Après Tysabri – que fait-on?
Chez les personnes atteintes d’une forme très active ou agressive de SP, Tysabri est un médicament extrêmement utile pour arrêter l’inflammation dans le système nerveux central (SNC) et mettre un frein aux symptômes qui entraînent une incapacité. Cela vient du fait que Tysabri est très efficace pour empêcher les cellules immunitaires actives d’entrer dans le SNC et causer de l’inflammation et des lésions tissulaires.
Mais cette approche est nécessairement une stratégie à court terme. Contrairement aux autres médicaments contre la SP, Tysabri ne modifie pas la réponse immunitaire anormale observée dans la SP. Il renforce la barrière qui protège le cerveau, mais les cellules immunitaire activées – les barbares à nos portes – sont toujours à l’extérieur et attendent l’occasion d’envahir. Si la barrière faiblit, comme dans le cas où le traitement par Tysabri est arrêté, les risques sont élevés que la SP fasse un retour en force et que les bienfaits du traitement soient vite perdus.
L’effet indésirable le plus préoccupant de Tysabri est la LEMP (leucoencéphalopathie multifocale progressive), une infection cérébrale souvent fatale. Le risque de contracter la LEMP augmente considérablement après deux ans d’exposition au médicament, c’est pourquoi de nombreux médecins recommandent de cesser Tysabri après avoir reçu 24 perfusions mensuelles. Mais que faut-il faire à propos des barbares?
Un certain nombre d’études ont exploré si un nouveau médicament serait capable de contrebalancer la recrudescence de l’activité de la maladie qui se produit souvent quand le traitement par Tysabri est arrêté et que les barbares prennent d’assaut les barricades du cerveau. Une étude de petite envergure a montré que Copaxone n’était pas beaucoup plus efficace que l’absence de traitement pour prévenir les poussées et l’activité inflammatoire après l’arrêt de Tysabri (Havla et ses collaborateurs. J Neurol 2011;258:1665-1669). Au cours d’une deuxième étude, les chercheurs ont essayé d’administrer un cycle de stéroïdes suivi par Copaxone, mais plus de la moitié des participants ont tout de même eu des poussées et une aggravation de l’inflammation à l’IRM (Magraner et ses collaborateurs. J Neurol 2011;258:1805-1811).
Le fait de passer à un médicament plus puissant, comme Gilenya, n’a pas semblé être immédiatement efficace (Havla et ses collaborateurs. J Neurol 2013;260:1382-1387). Ces résultats ont amené certaines personnes à penser que puisque la SP s’aggravait quand le traitement par Tysabri était arrêté, la meilleure solution consistait à continuer Tysabri indéfiniment. Mais étant donné les risques de LEMP, cette solution fait penser au raisonnement d’une personne qui reste dans une maison en flammes parce qu’elle a peur de se faire agresser dans la rue.
Toutefois, certains résultats provenant d’études sur le changement de traitement semblent indiquer que le problème serait lié au temps écoulé entre les traitements. Il faut attendre d’un à deux mois pour que Tysabri soit éliminé de l’organisme; il faut quelques mois avant que Gilenya soit pleinement efficace. Donc si l’instauration du traitement par Gilenya est retardée, il y a une période sans traitement au cours de laquelle une poussée de SP peut survenir. Trois études ont rapporté que les patients se portaient mieux si le traitement par Gilenya était instauré dans les trois mois suivant l’arrêt de Tysabri (Havla et ses collaborateurs. J Neurol 2013;260:1382-1387; Jokubaitis et ses collaborateurs. Neurology 2014;82:1204-1211; Cohen et ses collaborateurs. JAMA Neurol 2014;71:436-441).
Les résultats de la plus vaste étude à examiner cette question ont été publiés (Kappos et ses collaborateurs. Neurology 2015; publié en ligne le 29 mai 2015). L’étude TOFINGO a été planifiée au départ comme une étude de phase IIIb, puis elle a été rétrogradée en étude de phase IV quand le commanditaire y a mis un terme de façon précoce. Les patients qui ont cessé le traitement par Tysabri ont reçu Gilenya après un délai (période sans traitement) de deux, trois ou quatre mois. Ceux qui ont commencé à prendre Gilenya plus tôt (après deux ou trois mois) se portaient mieux. Ils présentaient en effet moins de nouvelles lésions visibles à l’IRM. Plus de patients des groupes qui ont commencé Gilenya après la période sans traitement de 2 ou 3 mois n’ont pas eu de poussées (de 88 à 91 %) que de patients dans le groupe ayant commencé après la période sans traitement de 4 mois (84 %). Ainsi, les résultats de cette étude soutiennent l’hypothèse selon laquelle une période sans traitement plus courte est un meilleur choix pour prévenir une poussée de SP à l’arrêt du traitement par Tysabri.
Il existe d’autres options pour les personnes qui envisagent l’arrêt du traitement par Tysabri. D’autres traitements contre la SP, notamment Lemtrada, peuvent être plus efficaces pour prévenir la survenue de poussées post-Tysabri, mais ces options restent à examiner. Arrêter progressivement le traitement par Tysabri en espaçant les dernières perfusions peut également faciliter la transition vers un autre traitement (Weinstock-Guttman et ses collaborateurs. AAN 2015; résumé P3.287). Peu importe la méthode choisie pour l’arrêt de Tysabri, il est préférable de faire une IRM afin de s’assurer que le patient n’a pas une LEMP non décelable avant d’instaurer le prochain traitement.
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